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Irène Drésel, ce délicieux ovni

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Artiste plasticienne, musicienne, Irène Drésel est de ces personnes dont la création est le leitmotiv et l’art la passion. Qu’importe le moyen pourvu que l’œuvre soit là. Et quelle œuvre, singulière et unique… Elle entraîne celui qui écoute ou regarde à sa suite, dans un monde hybride où l’esthétique est reine. Rencontre avec une artiste aux multiples visages.

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Irène Billard,

Irène Billard by Garance Li

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Artiste plasticienne, comment est née votre passion ? Qu’est-ce qui vous a poussé à vous y consacrer ?

Mon père dessine à merveille et j’ai toujours entendu ma mère jouer du piano à ses heures perdues. Comme beaucoup d’artistes j’ai toujours été attirée par l’art depuis toute petite. Je construisais mon univers dans ma chambre avec mes feutres, du scotch, des feuilles de papier, mon petit appareil photo et ma radio pour m’enregistrer sur cassette. Je suis entrée aux Beaux-Arts de Paris un an après le lycée, en parallèle de l’Ecole des Gobelins (département photographie). Les Beaux-Arts, c’est quelque chose… vous êtes lâchés dans la nature, débrouillez-vous pour trouver un atelier et c’est parti ! Ca forme très tôt à l’autodiscipline.

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Irène Billard,

Irène Billard, « Goodbye » 2012 , accumulation de débris de verre Securit provenant d’actes de violence humaine délibérée – 240x510cm

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Quelles sont vos inspirations ? Ce qui nourrit votre art ? Comment définiriez-vous vos créations plastiques ?

En ce qui concerne mon travail plastique, il vient d’une observation constante de ce qui se passe autour de moi. Beaucoup de choses me captivent et me fascinent. Dès que j’éprouve ce sentiment fort, j’essaie de trouver quelque chose à faire avec, en cherchant la manière de le retranscrire avec justesse. Je joue sur une tension entre deux extrêmes à partir d’une formule simple qui est de dire : attraction + répulsion = fascination. En fait mon travail se situe souvent juste avant le point de bascule, non sans une part d’humour (grinçant) sous-jacente. Je n’explore pas les idées qui risqueraient de ne pas voir le jour. Je ne creuse que là où ça me paraît vraiment fort car chaque projet demande toujours beaucoup d’énergie.

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Pouvez-vous nous donner un exemple ?

J’ai mené une performance qui s’appelle Bonne Nuit. C’est une performance filmée à la fois poétique et drôle. A cette occasion, je viens au domicile du collectionneur lui lire une histoire à son chevet une demi-heure avant qu’il ne s’endorme (récit que j’invente à partir de trois mots qu’il m’aura donnés en amont). C’est cocasse de se trouver face à un célèbre collectionneur en tenue de pyjama…

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Irène Billard,

Irène Billard, « Bonne Nuit » 2015-2016, performance filmée – durée 30minutes

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De l’image au son : comment avez-vous commencé à vous intéresser à la musique ?

Il y a cinq ans j’ai eu l’envie d’accompagner ma première exposition personnelle avec du son. C’est là que je me suis demandée : et si je le faisais moi-même? À l’époque j’écoutais beaucoup de techno et je brûlais d’envie de composer moi-même de la musique électronique. En faisant de l’image j’avais la sensation d’être à 70% de mes capacités, comme si la boucle n’était pas complètement fermée. J’avais l’intime conviction qu’il fallait que j’aille explorer cette piste là aussi. Je m’y suis mise petit à petit, en tâtonnant, en commençant avec le strict minimum, et je suis complètement tombée dedans. Puis les choses se sont développées peu à peu. J’ai suivi une petite formation de six mois en MAO (musique assistée par ordinateur) à la SAE à Aubervilliers. C’est là que j’ai fait la connaissance de l’ingénieur du son avec qui je travaille aujourd’hui de manière régulière. J’ai ouvert ma page soundcloud sous le nom d’Irène Drésel (le nom de ma mère), décidant de conserver mon nom, Irène Billard (mon patronyme), pour l’art contemporain, et ainsi de différencier les deux pratiques.

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Quelles sont vos influences et inspirations ?

Mes influences viennent de contemporains comme Christian Löffler, James Holden, Stefan Bodzin ou Extrawelt, dont j’ai dû écouter l’intro de One Tree Hill un millier de fois sans jamais me lasser. Je ne suis pas vraiment une boulimique de musique, je télécharge très peu de morceaux, j’écoute les mêmes artistes en boucle ! Puis l’an passé j’ai été invitée par le label InFiné (qui aujourd’hui signent le clip de Lutka) à réaliser un remix pour l’album Rethinking Z en l’honneur de l’artiste Bernard Szajner.

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Capture du clip

Capture du clip « Lutka »

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Quel est votre rapport à votre musique et votre création ?

J’ai besoin de produire pour me sentir bien. J’essaye d’avancer sur mes morceaux tous les jours. J’ai fait le choix de quitter Paris pour habiter en pleine campagne, de mon bureau j’ai vue sur le jardin, les mésanges (et les mangeoires !). Je suis bien, parfaitement au calme pour nourrir la concentration.

Ma musique est lancinante, j’aime les basses bien profondes et grinçantes, nuancées par des mélodies plus cristallines. L’idée c’est que ça vienne vraiment de l’intérieur. C’est un peu comme si j’essayais de faire de la techno à écouter au fond de son lit ! J’ai besoin que ça touche le fin fond des trippes. Depuis la sortie du clip je reçois de plus en plus de messages facebook d’inconnus qui découvrent ma musique et me font part de leurs ressentis, de leurs émotions. Ces messages font vraiment chaud au cœur !

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Irene Dresel by Suzie Q  + Leo Siboni

Irene Dresel by Suzie Q + Leo Siboni

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Parlez-moi de la composition de vos morceaux.

Je compose comme si j’écrivais ou si je faisais de la couture. J’avance pas à pas, de manière linéaire. Je m’enregistre, c’est ma voix qui va d’abord chanter une mélodie, puis j’éteins le dictaphone et je reprends et réorganise mes idées, cette fois-ci au synthé. Ensuite je trouve des titres simples en rapport à ma vie quotidienne. A l’époque où j’ai composé le morceau Jon, j’écoutais en boucle Jon Hopkins, ce qui explique ce choix. Le titre Lutka, quant à lui, n’est autre que le prénom de notre chienne que mon fiancé et moi avons depuis bientôt un an, un corniaud border collie-staff-boxer ! Le choix de tels titres permet d’ajouter un peu de simplicité et de légèreté à mes compositions.

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Capture du clip

Capture du clip « Lutka »

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Le clip de Lutka est envoûtant, fascinant. Comment avez-vous concilié vos deux passions : l’image et la musique ? Comment s’est passée la création puis la réalisation avec Florence Lucas/Flokim ?

Il se trouve que j’étais complètement fan du travail de Florence, découvert il y a trois ans via un article dans Technikart. Je l’avais contactée une première fois un an auparavant en me trompant d’adresse. L’été dernier je me suis réveillée un matin en réalisant que je n’avais jamais reçu de réponse de sa part. J’ai repris mes recherches et l’ai aussitôt recontactée, cette fois-ci avec le bon mail, et elle m’a répondu positivement dans les trois heures qui suivaient. Pour moi c’était absolument génial. Je lui ai donné le choix entre trois morceaux, elle a choisi Lutka.

Elle habite à Berlin donc avons dû échanger par Skype (nous ne nous sommes encore jamais rencontrées autrement). J’ai décidé de lui laisser carte blanche. J’avais entière confiance mais je dois dire que le résultat a dépassé mes attentes. J’adore ce clip, sa couleur, sa rythmique, ses enchainements… il est fabuleux. Elle y a mis toute son énergie et a su s’entourer de gens compétents comme Jack Antoine Charlot pour le montage, Alexis Poligné et Axel Crépaldi (un de mes amis) pour les effets After Effect.

Le clip de Lutka permet d’apporter une vraie identité visuelle à de la musique que peu de gens ont l’habitude d’écouter, à savoir de l’electronica pure et dure. Je suis en totale adéquation avec l’univers de Florence. Nous nous sommes rendues compte que nous avions énormément de points communs. La collaboration rêvée !

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Dites m’en plus sur votre actualité. Quels sont vos projets, vos envies ?

Mon envie ? Retravailler avec Florence ! Ou d’autres réalisateurs, bien entendu, si tant est qu’ils soient aussi bons qu’elle… Sachant que je viens de l’image, j’ai un avis bien précis sur les choses et je suis plutôt exigeante. J’aime bien l’idée de la carte blanche, mais c’est un risque ! J’aime les univers inattendus et marqués, à condition qu’on ne tombe pas non plus dans le grand n’importe quoi. Je ne suis pas une grande adepte de la demi-mesure. Un jour un collectionneur m’a encouragé dans ce sens : « Irène, continuez de montrer un travail fort et les gens vous suivront. Car au moins ceux qui vous suivront vous supporteront vraiment. On ne soutient pas avec la même conviction les productions moyennes et consensuelles. »

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Irene Dresel by Suzie Q + Leo Siboni

Irene Dresel by Suzie Q + Leo Siboni

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Que pouvons-nous vous souhaiter pour la suite ?

En ce qui concerne l’art contemporain, j’aimerais continuer à participer autant que possible à de nouvelles expositions collectives. J’ai participé au Salon de Montrouge l’an passé et j’ai gardé contact avec pas mal d’artistes exposés là-bas dont le travail est vraiment bon. Pourquoi pas aussi trouver une galerie… Ce serait un soutien évident.

Et pour la musique, je rêverais d’avoir déjà un nouveau clip, et de sortir au plus vite mon premier EP ! J’aimerais collaborer avec un label ambitieux et dynamique qui puisse me soutenir dans ce sens.


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